Quatre anciens cadres du Front national, qui furent compagnons de route de Jean-Marie Le Pen, expriment de vives critiques face aux évolutions du parti frontiste. Wallerand de Saint-Just les juge «aigris»
Quel regard portent les anciens cadres frontistes portent-ils sur le séminaire de «refondation» du FN, qui s’est déroulé vendredi et samedi à Nanterre? Si certains d’entre eux représentent un univers et des personnalités politiques avec lesquels Marine Le Pen a voulu rompre depuis son élection à la tête du mouvement, en 2011, cela n’empêche pas ces fins connaisseurs du FN d’avoir un avis, qu’ils l’exposent sans pincettes, ni concessions. «Finalement, au FN comme au PS, il n’y a rien à refonder. On peut essayer d’habiller ces partis comme on veut, ils ont chacun un cœur nucléaire. Celui du Front national c’est l’immigration», tranche Jean-Claude Martinez. L’ex-vice-président du FN compte vingt-quatre années de frontisme au compteur (1984-2008) et sa lecture des réussites et des échecs électoraux de Marine Le Pen ne s’embarrasse d’aucune nuance. «Elle n’a aucune stratégie, aucune vision. Il y a eu un peu de sociétal dans sa campagne mais les électeurs du FN n’ont pas voté pour ça. Ce parti repose simplement sur un nom de famille et un identifiant». Martinez n’accorde aucune importance aux débats internes du parti. Pour lui, Philippot «ne pèse rien» et son «corpus idéologique n’existe qu’à l’intérieur du FN». «Le jour où Marine Le Pen décidera de le virer, il disparaîtra, comme moi j’ai disparu, avec 0,87 %» ironise-t-il, en pointant la «culture du chef» qu’il juge centrale au Front. «Il ne sortira rien de ce séminaire» jurait, par avance, l’ex-dissident en désignant Marine Le Pen comme la «seule responsable des défaites» du Front national.
«Une dérive programmatique importante»
Après avoir quitté le FN, Eric Pinel a rejoint la Parti de la France, parti présidé par Carl Lang, autre ex-dissident qui a pourtant appelé à voter Marine Le Pen au second tour de la présidentielle, par «principe». Pinel estime que le FN est en perte de repères. «Avant qu’elle prenne la présidence du FN, nous avions remarqué une dérive programmatique importante. Le parti a trouvé de nouveaux électeurs mais beaucoup se demandent où va le mouvement», pointe l’ancien directeur de cabinet de Bruno Gollnisch. Il a passé plus de dix ans au FN (1998-2008). «Finalement, Philippot collait bien à la volonté de Marine Le Pen de faire un FN light. Il a apporté une méthode et des informations sondagières mais finalement, en s’éloignant du terrain des idées, on glisse vers celui de la démagogie», blâme l’ex-conseiller écologie du FN.
On entend d’ailleurs les mêmes critiques chez Carl Lang. Frontiste de 1978 à 2009, celui qui occupa deux fois le siège de secrétaire général et une fois celui de vice-président fait porter le poids des tourments frontistes sur les épaules de Marine Le Pen et de sa «démagogie populiste de gauche». «Le problème, ce n’est pas le parti, c’est elle», insiste-t-il. Le séminaire de Nanterre va simplement révéler une «contradiction» entre la direction et la base du parti, selon lui. «Philippot est le bouc émissaire idéal mais Marine Le Pen, obsédée par la dédiabolisation, n’est pas une femme de droite nationale. Entre les deux tours de la présidentielle, elle a fait une campagne sur les électeurs de Mélenchon et pas ceux de Fillon, alors qu’il n’y avait plus de candidat de droite» accuse le président du PDF. Carl Lang, on l’aura compris, n’attend pas grand-chose d’une réunion du bureau politique élargi. «Le problème d’un séminaire, conclut-il, n’est pas tant de réfléchir que de décider. Marine Le Pen est dans la quadrature du cercle. Elle veut profiter du FN en voulant tout changer. Mais tout changer peut aussi être suicidaire politiquement.»
«Le problème d’un séminaire n’est pas tant de réfléchir que de décider»
our Jean-Yves Le Gallou, passé au FN entre 1985 et 1998, le FN a fait une campagne présidentielle «sur le terrain de l’adversaire» alors qu’il devait s’emparer des enjeux «civilisationnels». Pour sa part, Carl Lang n’attend pas grand-chose d’une réunion du bureau politique élargi. «Le problème d’un séminaire n’est pas tant de réfléchir que de décider, conclut l’ex-frontiste, Marine Le Pen est dans la quadrature du cercle. Elle veut profiter du FN en voulant tout changer. Mais tout changer peut aussi être suicidaire politiquement».
Côté Front, ces attaques n’émeuvent pas grand monde et encore moins Wallerand de Saint-Just . Lui aussi est un ancien du parti mais, contrairement à ceux qui ont quitté le FN, le trésorier est resté un fervent supporter de Marine Le Pen et de sa stratégie à la tête du parti. Ces critiques, il les entend sans surprise, avec recul et «commisération», parce qu’elles viennent de commentateurs qu’il affirme connaître «par cœur». «Tous ces gens-là sont des aigris, riposte le cadre FN, ils ont quitté le Front national et ne s’en sont jamais remis. Ils ont passé leur vie à rater leur entreprise ou à dire du mal du Front. En réalité, ils supportent difficilement l’ascension menée par Marine Le Pen depuis 2011. Sans les écouter, elle a réussi à hisser le Front national à près de 11 millions d’électeurs…»
http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/2017/07/24/25001-20170724ARTFIG00037-refondation-du-fn-le-probleme-ce-n-est-pas-le-parti-c-est-marine-le-pen.php?utm_term=Autofeed&utm_campaign=Echobox&utm_medium=Social&utm_source=Twitter#link_time=1500880125
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