Réveil brutal pour la majorité socialiste et l’exécutif: loin de l’esprit réformiste et d’union nationale prôné par François Hollande, le gouvernement a choisi le passage en force pour son emblématique loi Macron, un sévère avertissement à un peu plus de deux ans de la présidentielle.
Le conseil des ministres « ordinaire » qui se réunira ce mercredi pourrait bien avoir ainsi un goût amer au lendemain de ce coup de théâtre qui a vu le gouvernement être convoqué en toute hâte mardi à l’Elysée pour engager la procédure du 49-3, redoutant d’être mis en minorité à l’Assemblée.
Et même si le rejet de la motion de censure de l’UMP et de l’UDI en débat jeudi soir ne fait aucun doute –il entraînera ipso facto l’adoption sans vote en première lecture de la loi Macron– il y avait de quoi plomber aussi l’ambiance du traditionnel « dîner de la majorité » mardi à l’Elysée.
Parmi les convives: le Premier ministre Manuel Valls, le président de l’Assemblée Claude Bartolone mais aussi les ténors du PS, Jean-Christophe Cambadélis ou Bruno Le Roux, qui n’ont pas réussi à ramener au bercail les « frondeurs » de l’aile gauche du parti.
Le chef de l’Etat misait pourtant gros sur une adoption sans drame du texte « pour la croissance et l’activité ». Même s’il ne s’agissait pas, selon ses propres mots, de la « loi du siècle », elle devait donner un « coup de jeune » à la société française et annoncer une seconde partie de mandat plus offensive avec d’autres textes en perspective, comme la réforme du dialogue social.
Or le 49-3 est une arme à un coup. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le Premier ministre ne peut y recourir que sur un seul projet de loi par session parlementaire, en dehors des textes budgétaires.
L’entourage du chef de l’Etat tentait toutefois de minimiser les effets de cet accouchement au forceps lundi soir : « L’exécutif est plus que jamais déterminé à réformer ce pays », assurait-il.
Mêmes éléments de langage dans la bouche du Premier ministre: invité du 20 heures de TF1, Manuel Valls a protesté de sa « très grande détermination » à « poursuivre les réformes, parce qu’il en va de l’intérêt du pays ».
– ‘Victoire à la Pyrrhus’ pour les frondeurs ? –
« Le gouvernement va continuer à travailler, à réformer plus vite et plus fort, oui », a renchéri le ministre de l’Economie Emmanuel Macron, au même moment sur France 2.
Quant au recours au 49-3 que François Hollande dénonçait encore en 2006 comme une « brutalité » et un « déni de démocratie », il s’inscrivait alors « dans un contexte complètement différent », plaide-t-on à l’Elysée.
« Il s’agissait du « contrat première embauche » et des centaines de milliers de personnes étaient dans la rue alors que, cette fois, la réforme, comme les instituts de sondage l’ont largement rappelé, est soutenue par l’opinion publique », souligne l’entourage du président.
Analyse en demi-teinte d’un proche du président: l’exécutif avait le choix « entre deux inconvénients, l’échec de la loi Macron par un vote ordinaire ou son succès par un vote forcé ».
« Je ne vois pas de socialiste heureux après cet épisode », ajoute-t-il, reconnaissant que « lorsque l’on parle d’union nationale, ce serait bien de faire celle des socialistes ».
Quant aux « frondeurs », emmenés par l’ex-ministre Benoît Hamon, ils auraient remporté une « victoire à la Pyrrhus, échouant à faire chuter la loi et peut-être aussi le ministre Emmanuel Macron ».
L’affaire, quoi qu’il en soit, est pain béni pour l’opposition, à droite comme à la gauche de la gauche, réunies dans une improbable coalition (le Front de gauche votera la motion de censure de l’UMP). Jean-Luc Mélenchon, leader du Parti de gauche, y a vu « le constat de décès de la majorité de 2012 ».
« La vérité éclate au grand jour: il n’y a plus ni majorité, ni gouvernement », a affirmé le président de l’UMP Nicolas Sarkozy, qui n’a jamais recouru au 49-3 pendant son quinquennat. « C’est la fin de l’unité transpartisane » post-attentats, a argué Jean-François Lamour (UMP).
Avant même cet épisode, la popularité du couple exécutif, après le bond enregistré dans la foulée des attentats de Paris, avait reflué dans plusieurs sondages donnant ces derniers jours les cotes de François Hollande et Manuel Valls en recul 4 à 8 points.
afp
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