Les salariés de Ardennes Forge sont condamnés à rembourser des indemnités indûment perçues. Des drames personnels qui cachent une lourde responsabilité syndicale
La Cour de Cassation a tranché, il faut rembourser
Derrière les panneaux « danger de mort », des cannettes vides jonchent le sol et des végétaux crèvent le béton. Ardennes Forge, l’éphémère société de métallurgie repreneuse de l’équipementier automobile Thomé-Génot, a été liquidée ici, il y a 9 ans déjà….
Dans le volet pénal du dossier, trois prévenus dont le directeur général d’Ardennes Forge avaient été condamnés en 2014 pour « travail dissimulé », un chef d’accusation finalement balayé par le juge civil, entraînant de facto l’annulation des indemnités afférentes qui avaient été allouées.
Du coup, les ex-Ardennes Forge doivent restituer 470.000 des 900.000 euros de dommages-intérêts alloués par le conseil des prud’hommes, suite à un pourvoi en appel de l’AGS, en mars 2012, confirmé par la Cour de cassation le 13 juillet 2017.
Des drames familiaux
« Ici tout a fermé, c’est plus que de la friche« , dépeint Jean-Michel Prusinowski, bacchantes et veste en cuir, devant les grilles bleues écaillées de l’ancien site d’Ardennes Forge à Nouzonville (Ardennes), 6.300 habitants et 21% de chômage. L’AGS (système d’assurance des salaires financé par cotisations patronales) réclame « 18.500 euros sur les 24.000 touchés aux prud’hommes » à Jean-Michel Prusinowski, 59 ans dont une trentaine d’années passées à l’usine puis neuf à pointer à Pôle emploi. Il vit aujourd’hui avec « 500 euros par mois », dans « une vieille baraque ». Comme ses anciens collègues, il est « en colère » mais a accepté à contre-cœur de constituer un dossier pour que chaque situation soit examinée au cas par cas. « C’est pour essayer de nous diviser », prédit-il, persuadé que « si on rend l’argent, ça voudra dire qu’on est coupables, qu’on aura baissé notre froc. Ce sera ça le message ! »
« Je demande juste un peu d’humanité » parce que nous sommes « au bout du bout », répète Rémi Petitjean, grand gaillard au crâne dégarni et ancien représentant des salariés. A 51 ans, il s’est servi des 12.000 euros de dommages-intérêts pour monter sa propre entreprise « multi-services », acheter une camionnette et embaucher un salarié… avant de déposer le bilan il y a quatre mois. Une expérience qui, peut être lui fait toucher du doigt la dure réalité de ce qu’est un entrepreneur et un patron obligé de licencier… « J’ai les deux gamins qui vont en fac l’année prochaine, faut assurer derrière… Ça m’angoisse », confie-t-il pudiquement, déterminé à se battre quitte à entamer « une grève de la faim » pour médiatiser la détresse collective.
A Neufmanil, commune nichée dans le massif des Ardennes, Fanny et Stéphane Cossardeaux, 46 et 43 ans, partagent ce sentiment « d’injustice » depuis qu’ils ont appris qu’ils devaient reverser 20.500 euros sur les 24.000 perçus initialement. Des indemnités en partie utilisées pour « remplir des Caddie de courses en fin de mois », pas pour partir en vacances. « On n’a plus trop de projet de vie avec cette épée au-dessus de la tête », glisse Fanny, assise sur le canapé de leur appartement en HLM. « J’attends de savoir à quelle sauce on va être mangés », ajoute Stéphane qui a retrouvé un emploi comme diagnostiqueur immobilier mais vit mal cette situation « usante ». Comment envisager la suite ? « On veut nous maintenir dans notre condition d’ouvriers mais chacun a le droit de concrétiser ses rêves« , affirme son épouse qui exprime là tout le problème d’une société qui depuis 40 ans fait croire à ses membres qu’on peut et qu’on doit « vivre ses rêves » et non les construire et les gagner… Une société qui a pris l’habitude d’emprunter des centaines de milliards pour servir du rêves à ses membres qui ne comprennent pas qu’il ne leur pas possible de faire la même chose à leur échelle.
« On s’est bien fait avoir »
« On s’est fait avoir » : les 47 ex-salariés d’Ardennes Forge nourrissent une « colère » tenace depuis qu’ils ont été condamnés à rembourser une partie des dommages et intérêts touchés après leur licenciement en 2008. Une situation qu’ils n’hésitent pas à qualifier d’ « injustice ».
ourtant, personne ne leur avait dit lors du verdict qu’au cas où ils perdraient en appel ils devraient rembourser? Bien sûr que si! Ils le savaient pertinemment, mais en France on a tellement pris l’habitude que le patron est là pour payer et qu’il a toujours tort, qu’il a intrinsèquement tort, qu’à aucun moment ces bougres n’ont cru qu’il pourrait en être autrement.
Et maintenant, où sont les syndicats qui leur ont fait miroiter ces indemnités mirifiques et les ont lancés dans cette procédure? Où est la fameuse « solidarité ouvrière »? Pourquoi les syndicats n’utilisent ils pas les millions de subventions qu’ils engrangent pour indemniser ces pauvres gars dont le seul tort est de leur avoir fait confiance?
Au lieu de s’en prendre à la justice qui, en l’occurrence, n’a fait que dire le droit, il serait plus judicieux de se retourner vers les « vrais » coupables, ceux qui ont fait croire que manipuler un conseil des prud’homme pouvait être « justice »!
Oui, « vous vous êtes bien fait avoir », mais pas par ceux que vous désignez, par ceux qui vous ont, justement, « vendu du rêve »….
Source : challenge via maviemonargent
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